Si les femmes musulmanes sont vraiment victimes du port du voile : je ne vois pas comment les stigmatiser et en interdire le port leur apporterait plus de liberté.
Si les femmes musulmanes décident elles-mêmes de porter le voile (ce que j’ai pu constater auprès de celles avec qui j’ai pu discuter en Iran en 2000) : c’est encore une fois les transformer en objets et pas leur accorder le statut de sujet pensant et agissant.
C’est très très agaçant, ce truc très impérialiste de “donner la liberté” à des groupes de population avec ses gros sabots et ses œillères sans les rendre acteurs de leur libération, sans balayer devant sa porte.
À ma connaissance, Elisabeth Badinter n’a pas appelé au boycott de grandes marques pour s’opposer à la maigreur que la mode et le prêt-à-porter véhiculent. S’indigne-t-elle des conditions de travail des sous-traitants de l’industrie textile en Bulgarie ou au Bengladesh ? Des salaires et des conditions de travail des employés de cette industrie dans les pays développés ? Par la pollution que ce secteur produit, qui détruit la santé et l’écosystème ?
Qu’est-ce que c’est que cette indignation sélective, quand ils ne sont même pas foutus eux-mêmes de vivre leur combat à fond et d’être cohérents avec eux-mêmes ? Pierre Bergé, chef d’entreprise et actuel président de la Fondation pierre Bergé-Yves Saint Laurent, qui demande de “renoncer à l’argent” aux marques proposant des voiles dans leurs collections, et qui, non content de vendre des vêtements pour les femmes riches, blanches et maigres si on en croit ses publicités (lire ici), aurait déjà vendu des collections s’inspirant de l’esthétique du voile (lire ici).
Elisabeth Badinter, qui donne des leçons de laïcité, et qui tient une partie de son patrimoine d’une agence de pub qui fait la communication de l’Arabie Saoudite.
Je ne souscris pas du tout au discours « arrêtons avec le féminisme, il y a plus grave ». Si si, c’est très grave, fondamental même, mais faut pas se foutre de notre gueule et montrer toujours les mêmes du doigt ! Moi aussi je préfèrerais que les femmes n’aient pas envie de cacher des parties de leur corps… Moi-même je suis parfois gênée de montrer des zones de mon corps peu canoniques (quand bien même j’en ai très envie, pour être à l’aise quand il fait chaud), ce qui ne m’empêche pas d’être agacée que les hommes puissent se balader torse nu alors que les femmes doivent cacher leurs seins !
Il faut voir le tableau tout entier plutôt que trouver des solutions totalement hypocrites et condescendantes !
À l’autre extrême du curseur des injonctions faites aux femmes, il y a celle d’être sexy, d’être souriante, de prendre soin de soi (physiquement, bien sûr).
Sommes-nous réduites au choix ridicule entre être la sainte en voile ou la putain en décolleté, sous des injonctions extérieures à nous, mode ou religion ?
Si on libérait les femmes du patriarcat, une vraie et profonde libération de nos esprits à tous, pas juste des petites lois hypocrites, elles n’auraient ni envie de porter le voile pour se protéger de la frustration sexuelle des hommes, ni envie se faire refaire les seins ou de se lancer dans des régimes amaigrissants en série.
Par ailleurs, je me dis qu’une meilleur répartition des richesses aiderait à instruire les femmes, à les libérer (entre autres vertus sociales, et je me demande si les sciences sociales me confirmeraient ça, je tâcherai de vérifier).
Alors les people qui essaient de nous dire que penser, que faire, et de nous désigner l’ennemi (musulmans, chômeurs, fraudeurs aux cotisations sociales, intermittents, et puis quoi encore ?). Ce sont eux qui nous appauvrissent et créent des fractures dans notre société. Alors allez vous faire voir*.
C’est bien que ces Panama Papers sortent maintenant, pendant qu’un mouvement social se crée. Il y a un moment que je rêve de voir naître une convergence des luttes, une prise de conscience qu’on devrait tous ramer dans le même bateau contre les inégalités. Et ce scandale tombe à pic, il donne un autre retentissement au flot habituel de conneries des personnalités publiques qui nous parasitent. J’espère que tout le monde a maintenant toutes les informations en main pour se rendre compte qu’ils n’ont aucune légitimité pour parler ou décider à notre place.
Je vais tâcher d’accorder moins de temps de cerveau disponible à ces Tartuffes, et aller voir ce qui se raconte lors des « Nuits Debouts », ça promet d’être autrement intéressant.
*Oui je sais on dirait un petit chaton énervé quand je dis ça, je sais, c’est parce que j’essaie d’éviter les insultes homophobes ou sexistes, c’est très bien expliqué ici pourquoi ça vaut la peine.